Cousu de fil blanc, suite

De fil en aiguille... du Mariage pour tous (loi de mai 2013) en procréation médicalement assistée (promesse de Macron en 2017), on arrive à la gestion pour autrui... pour tous. C'était ce dont je voulais traiter hier avec Cousu de fil blanc. En effet, et c'est du bel ouvrage. Sauf que l'évolution, programmée de longue date par les politiques sensibles aux associations lobbyistes, se fait non par la loi, le législateur, mais par l'interprétation de la loi par les juges. Ainsi, avant-hier 18 décembre 2019, la Cour de cassation est allée contre le refus de la justice française de ne pas accorder la transcription intégrale de l'acte de naissance d'un enfant né à l'étranger d'une gestation pour autrui. Une semaine auparavant, le 12 décembre, la Cour européenne des droits de l'homme avait confirmé ce droit à refuser « tant que la filiation avec la "mère d'intention" peut être reconnue par l'adoption ». Ce 12 décembre, la CEDH déclarait donc « irrecevables » les requêtes de deux familles qui s'étaient vu refuser par la justice française la transcription sur les registres de l'état civil français de l'intégralité des actes de naissance d'enfants nés à l'étranger par gestation pour autrui, l'une pour un enfant né par mère porteuse aux Etats-Unis, l'autre pour trois enfants nés aussi par mère porteuse au Ghana (spermatozoïdes des pères et ovocytes des tierces donneuses), estimant que le refus de la justice française n'est pas disproportionné, car le droit français offre une possibilité de reconnaissance du lien de filiation entre les enfants requérants et leur mère d'intention par la voie de l'adoption de l'enfant du conjoint ». Une semaine plus tard, des juges français, concernant les requêtes de deux couples, l'un homosexuel, l'autre lesbien, statuaient que « deux membres d'un couple d'hommes, et non plus le seul père biologique, peuvent être intégralement reconnus en France comme parents d'un enfant né à l'étranger de GPA » et qu'il en était de même pour un couple de femmes. Ces juges ne faisant en fait qu'étendre aux couples de même sexe une décision qu'un autre juge avait déjà prise en octobre dernier* pour les couples hétérosexuels et la reconnaissance à l'état civil de la « mère d'intention », bien que la loi ne reconnaissent pas en France la gestation pour autrui. Je me demande donc à quoi servent que députés et sénateurs fassent des lois. Cela ne fait aussi penser à cette phrase : si le peuple ne vous convient pas, changer de peuple. 

Un couple, hétéro mais aussi homo ou lesbien, peut donc aller acheter le ventre d'une femme porteuse à l'étranger (contournant ainsi l'interdiction française) et revenir avec un enfant et l'imposer à l'état civil français non plus au seul père biologique mais aussi à la compagne « mère d'attention » ou au compagnon « père d'intention ». Papa 1 et Papa 2. Maman 1 et Maman 2. Les deux sont les parents de l'enfant. Sans passer par la Chambre des députés. Parents d'un enfant que la loi française n'autorise pas à concevoir de cette façon. C'est important ! C'est même un bouleversement biologique : deux hommes peuvent avoir un enfant. Idem pour deux femmes. L'erreur, le défaut, c'est ce mot : jurisprudence. Voilà le mal : car en fait, le juge, le magistrat français autorise simplement la transcription entière à l'état civil français des actes de naissance étranger (californiens, belges par exemple) sur lesquels les pères biologiques et les mères d'intentions apparaissent comme seuls parents. En octobre, ils ont imposé cette jurisprudence pour les couples hétéros, là ils l'imposent pour les couples homos et lesbiens, autrement dit ils forcent le loi française en l'interprétant, plutôt que de l'appliquer en toute objectivité. C'est illégal mais grâce à une maternité de substitution vous êtes reconnus parents de cet enfant. Vous pouvez l'élever légalement en France. J'oublie juste une chose : deux hommes homosexuels sont désespérés de ne pouvoir faire un enfant au même titre qu'un homme et une femme. Pourquoi diable l'un des hommes n'a-t-il in vagin, un utérus, des ovaires? Pour même pas le prix d'une voiture d'occasion en bout de course (mille cinq-cents euro) on peut donc avoir un bébé. Une carte bleue suffit donc, dorénavant, pour être papa 2 (un « père d'intention »). 

 

« Je suis né incapable d'avoir des enfants - je ne peux pas simplement aller coucher avec une femme », avait déclaré Kyle Carsson (I was born being unable to have kids - I can’t just go and have sex with a woman).

Au départ, quand on a mis l'ouvrage sur le métier, il s'est agi d'aider les couples donc la femme était stérile. Puis, pourquoi pas, dont l'homme était stérile. Puis, l'ouvrage fut remis sur le métier : s'agissant cette fois de donner un mari à un homme. On savait bien que deux hommes ne peuvent concevoir un enfant en couchant ensemble. « Je suis né incapable d'avoir des enfants », pensait et disait Kyle. La nature ne pouvait épouser sa nature. « « Je n'ai pas choisi d'être gay, je suis né comme ça. Je suis né incapable d'avoir des enfants. Je ne peux pas simplement aller coucher avec une femme. Etre papa était une grande priorité dans ma vie et maintenant je l'ai fait » (I did not chose to be gay, I was born that way. I was born being unable to have kids. I can’t just go and have sex with a woman. Being a dad was a high priority in my life and now I have done it). Il engendra grâce la maternité de substitution : dans une clinique, après avoir sélectionné dans une liste les caractéristiques physiques qu'il aimerait, le sexe, je l'ai déjà dit hier, puisqu'il voulait un garçon, mais aussi jusqu'à la couleur des cheveux et des yeux, moyennent mille cinq-cent euro son sperme est allé féconder l'ovule d'une donneuse (son identité ne pourra jamais être révélée au père et à l'enfant).

L'ouvrage a donc aussi était remis sur le métier pour eugénisme. Incapable, non pas de faire un enfant à une femme, mais de désirer une femme, un homme peut donc aujourd'hui, au Royaume-Uni, avoir un enfant sur mesure, sur catalogue. Kyle voulait un garçon blond aux yeux bleus : Miles est un garçon blond aux bleus. Remis demain en France sur le métier, on connait la prochaine étape. C'est cousu de fil blanc depuis le début.

Je ne sais si en Californie, en Belgique on peut choisir sur catalogue le sexe, la couleur des yeux et des cheveux de l'enfant que l'on veut, mais un père biologique et une mère d'intention, un père biologique et un père d'intention peuvent aujourd'hui aller dans une clinique britannique « faire » l'enfant de leur rêve et revenir en France le faire inscrire à l'état civil comme étant eux, papa et maman, ou papa et papa, de cet enfant sur mesure. 

 

* Le 4 octobre dernier, la Cour de cassation, plus haute juridiction judiciaire en la matière, a validé la transcription à l'état civil français des actes de naissance californiens de deux jumelles, Fiorella et Valentina, nées en 2000 d'une GPA dans cet état des Etats-Unis. Sur ces actes de naissance californiens, le père biologique et la « mère d'intention » sont les seuls père et mère : « Fiorella et Valentina Mennesson nées de Sylvie et Dominique Mennesson ». Malgré l'interdiction de la gestion pour autrui en France, les juges ont imposés cette jurisprudence. Deux mois plus tard, elle s'applique aux couples homosexuels.

Source : L'Express ; Daily Mail ; L'Express : L'Express

Photo : manifestation contre à la gestation pour autrui le 2 février 2014 à Paris.