Matteo Salvini s’impose à tous


« Le Mouvement 5 étoiles, anti-système, écrit Stéphane Bussard dans Le Temps, est en train de s'effondrer à peine un an après sa percée historique aux législatives. Il paie le prix de ses incompétences ». En coalition avec la Ligue de Salvini pour gouverner, 5 étoiles s'est effondré dans les sondages au fil des mois. Pendant que la Ligue montait à 38%... « Matteo Salvini a compris que, dans ces circonstances, il vaut la peine de jouer la carte "seul contre tous" [et il] choisira le moment de rompre avec le Mouvement 5 étoiles, avec lequel la Lega n'a plus grand-chose à partager », explique Stéphane Bussard.
Quant à l'opposition... La « Forza Italia de Berlusconi est en voie d'extinction » et le « Parti démocrate (PD) reste confiné aux classes moyennes supérieures et aux retraités. En Emilie-Romagne, région historiquement à gauche, il pourrait subir cet automne une défaite électorale mortifiante, menaçant son existence même. Il ne convainc plus les travailleurs encore déboussolés par l'austérité imposée après la crise de 2008. »
A l'opposé, en un an Matteo Salvini a acquis une « certaine stature ». Et rien ne semble ne plus pouvoir être l'arrêter dans son ascension. Dimanche dernier, "Matteo" s'est rendu à une fête de la Ligue à Milano Marittima au bord de la mer Adriatique. L'ambiance est totalement balnéaire : vêtements légers et glaces indispensables pour supporter la chaleur, les hommes sont torse-nu et les filles en bikinis, musique électro, « tong et les mojitos » (La Libre Belgique, aujourd'hui jeudi), et, tout président du Conseil qu'il est, il a tombé le tee-shirt et fait le DJ. Grand bien lui en a pris, car ses détracteurs, tous ses détracteurs ont bondi sur les réseaux sociaux pour dénoncer ce carnaval : comment le chef du gouvernement italien peut-il se comporter de la sorte? Torse nu sur une plage ! Aucun me disait les circonstances, personne ne disait que c'était pour une fête de son parti, on laissait croire que c'était comme ça : il passait sa journée de dimanche en vacances sur une plage pendant que 121 immigrants attendaient de trouver un port au large de Lampedusa). « Je préfère #Salvini aux commandes d'une platine comme dj des plages que #Salvini ministre, pas vous ? » Et d'aucuns de publier sur Twitter une photo de Salvini torse nu dansant devant une fille, jolie, en train de danser en bikini. Est-ce que notre Premier ministre se trémousse comme ça sur les plages? Car bien sûr, tout ce petit monde des détracteurs étaient français. Utilisant à son tour la photo, une journaliste, Francoise Degois pour ne pas la nommer, chroniqueuse à LCI, autrefois journaliste politique à France Inter et conseillère de Ségolène Royal, s'est fendue de ce tweet magnifique :


Grand mal en avait pris à tout ce beau monde : le buzz a tourné à l'avantage de Salvini.
Mais rien n'y fera. Ce matin, sous la photo d'un Salvini enlevant son tee-shirt à la fête de dimanche, le journaliste de La Libre Belgique écrit : « L'homme fort du gouvernement italien Matteo Salvini a raté le démarrage d'une tournée des plages qu'il comptait lancer mercredi au sud de Rome pour doper sa cote de popularité, en raison d'un net tangage de la coalition gouvernementale ».
Vraiment, il rate tout ce Salvini ! Et le journal belge poursuit (en fait, c'est un copié-collé d'une dépêche AFP) : « Le très populaire chef de la Ligue (extrême droite) devait entamer mercredi à Anzio et Sabaudia, au sud de Rome, un "beach tour" devant l'emmener en août dans sept régions côtières et se terminer en Sicile. Mais il a annulé ses deux premières sorties sur ces plages. Matteo Salvini a décidé de rester à Rome pour rencontrer le chef du gouvernement Giuseppe Conte, déchaînant les spéculations des médias italiens sur un possible éclatement de la coalition qu'il forme avec le Mouvement Cinq Etoiles (anti système) dirigé par Luigi Di Maio. Le "capitaine" Salvini a maintenu un meeting en soirée à Sabaudia, petite ville art déco construite sous Benito Mussolini, qui assécha les marais environnants pour créer une station balnéaire. L'effondrement de son allié gouvernemental, le Mouvement 5 étoiles, et la faiblesse de l'opposition lui ouvrent un boulevard. »
C'est bien, c'est super. Caser extrême-droite et Mussolini en si peu de lignes c'est... fréquent, très fréquent quand on parle de Salvini, en Belgique comme en France, mais pas en Italie. Car c'est là le problème : ce que nos journalistes vous rapporte, c'est l'œil de la France, pour ne pas dire la voix de la France. C'est plus belle la vie (voir le post d'hier), c'est l'armada du bourrage de crâne : à Salvini il faut systématiquement coller les mots extrême-droite puis, une fois sur trois, Mussolini deux phrases plus loin. Ça ne mange pas de pain. Comme Macron quand il évoque la peste brune. C'est comme une prise d'otages. Sans parler du nombre de fois où c'est populisme, nationaliste, guerre qui sont accolés à Salvini (et même chose quand ils parlent d'Orbán). Bien dans la ligne, le Huffington Post annonce (hier) : « Matteo Salvini lance une “tournée des plages” (où il jouera encore les DJ?) ».
Revenons à plus sérieux, plus objectif. Pour Le Temps, Stéphane Bussard écrit : « Pour Steve Bannon, l'ex-stratège de Donald Trump, l'Italie est le centre de gravité d'un mouvement national-populiste d'envergure mondiale. Et Matteo Salvini, ministre de l'Intérieur et homme fort du gouvernement de coalition, en est la parfaite incarnation. Personne ne semble en mesure d'interrompre son ascension et celle de son parti, la Lega, qui avoisine les 40% d'intentions de vote. Un paradoxe au vu du très maigre bilan de son gouvernement. La charge fiscale des Italiens a augmenté. La croissance de l'économie devrait se limiter à 0,1% pour 2019, la plus faible performance parmi les pays européens [...] Dans un système pourtant proportionnel, certains n'excluent pas que la Ligue obtienne une majorité absolue par le biais d'une mécanique électorale complexe, ou s'allie au parti d'extrême droite Fratelli d'Italia pour former un gouvernement davantage en phase avec ses idées. Un tel cas de figure inquiète Bruxelles [l'UE], qui ne peut pourtant plus se voiler la face : en Italie, l'immigration va continuer à dominer la scène politique. L'adoption lundi par le parlement du décret anti-immigrants [décret-loi sur la sécurité] est là pour le rappeler. La future présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, l'a compris. Elle était récemment à Rome pour présenter un nouveau pacte sur l'immigration et une réforme du système dit de Dublin, dont l'échec a fortement contribué à la montée des populistes en Italie. »

Petite parenthèse : le Gundhari a tweeté dimanche en réponse à la chroniqueuse de LCI :


Source : Le Temps ; La Libre Belgique ; Le Huffington Post
Photo : Matteo Salvini sur la plage de Milano Marittima lors d'une fête de son parti le 4 août 2019 ; captures d'écran sur Twitter

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