J'ouvre les portes

 
Recep Tayyip Erdoğan, le président de la République de Turquie relance (voir le 11 octobre) son chantage sur nous : « si vous ne m'aider pas à financer le rapatriement des réfugiés (sic) syriens dans leur pays, j'ouvre les portes de l'Europe ». C'est ainsi, profitant de sa visite en terre européenne, que lors d'une conférence de presse à Budapest devant le Premier ministre Viktor Orbán, il nous a envoyé cette nouvelle... incitation, ou recommandation, avant de préciser : « Avec ou sans soutien, nous allons continuer à accueillir nos hôtes, mais seulement jusqu'à un certain point [...] Si nous constatons que cela ne fonctionne pas, nous n'aurons pas d'autre choix que d'ouvrir les portes vers l'Europe.
Des Syriens ont commencé à venir en Turquie dès le début de la guerre en Syrie en mars 2011. En 2013, ils étaient deux cent mille. Quatre ans plus tard, dès 2014, les arrivées d'émigrés en Turquie déclassaient le Pakistan jusque là premier pays d'accueil au monde. En 2015 ils étaient deux millions et demi et les voilà trois millions six. Pour eux la Turquie n'est vu que comme un pays de transit, ils ne veulent pas s'y installer. « Il est possible qu'un grand nombre d'entre eux migrent en Europe », a insisté Erdoğan, ce sympathisant islamique - je ne vais pas me priver de le redire - qui persiste à vouloir installer une « zone de sécurité » dans le nord-est de la Syrie, qui est mitoyenne avec la Turquie, pour y installer une grande partie de ses émigrés syriens quand ses soldats auront arraché cette « zone » aux mains des combattants kurdes, nos alliées - je le redis aussi - dans la lutte contre l'Etat islamique. « La zone de sécurité que nous voulons créer vise à faire en sorte que les Syriens qui se trouvent dans notre pays retournent dans leurs maisons, sur leurs terres », a déclaré Erdoğan. Et, d'une pierre deux coups, il appelle la communauté internationale à participer au financement de la construction de ce qui serait « une ou plusieurs nouvelles villes ». Il a affirmé qu'il avait parlé de son projet au Secrétaire général des Nations Unies António Guterres et que ce dernier aurait promis de travailler à l'organisation d'un sommet pour récolter des fonds. 

Pour rappel, en mars 2016, après la déferlante migratoire essentiellement venue de l'appel d'air créé par Angela Merkel en 2015, la Turquie et l'Union européenne ont signé un accord pour mettre fin aux passages d'émigrés de la Turquie vers l'Europe. Depuis, Erdoğan est le gardien des frontières gréco-turc et bulgaro-turc européennes. Le gardien ou le maître? Sa menace, son chantage n'est pas d'aujourd'hui, il nous fait des piqures de rappel régulièrement, c'est son arme : avec trois millions six de doses à nous injecter, il a la main sur le « robinet migratoire ». 

Dans les faits, ces millions de Syriens sur le sol turc ne sont pas des « réfugiés » au sens défini par la Convention de Genève de 1951. Ils y bénéficient d'un statut de « protection temporaire » qui leur donne un accès gratuit aux différents services d'Etat – hôpitaux, système éducatif… – et au marché du travail. Du coup, bon nombre de ces émigrés syriens travaillent pour l'économie turque (certains diront qu'ils sont exploités par leurs employeurs et relèveront les conditions indignes dans lesquelles le pouvoir turc les relègue des camps de... « réfugiés »).

 
Photo : le camp d'émigrés syriens à Osmaniye en Turquie à quelques dizaines de kilomètres de la Syrie (15 décembre 2015) ; rappel de la carte de la Syrie avec, au nord-est, la zone concernée.

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