Italie, immigrants : le bras de fer


« Nous n'acceptons plus les ordres et les invasions », Matteo Salvini l'homme fort de l'Italie a de quoi prendre le mors aux dents. A peine trouvé un accord européen pour la répartition des 131 immigrants (dont 116 hommes) bloqués depuis plusieurs jours sur le navire des garde-côtes le Gregoretti dans le port militaire d'Augusta (Sicile), que l'Alan Kurdi de l'ONG allemande Sea-Eye et l'Open Arms de l'ONG espagnole Proactiva Open Arms ont pris la mer pour aller chercher des immigrants en Libye - contre l'interdiction des autorités espagnoles, en ce qui concerne l'Open Arms, d'aller au large de la Libye sous peine d'une amende de 200 000 à 900 000 euro (chiffres annoncés par l'ONG). Mercredi, l'Alan Kurdi a ainsi recueilli 40 immigrants originaires d'Afrique de l'Ouest (secourus la veille non loin de la Libye).  Matteo Salvini signe alors un arrêté interdisant les eaux italiennes au navire allemand et au navire espagnol (selon les informations données par les services de Matteo Salvini, le ministre de la Défense et le ministre des Transports, tous deux issus du Mouvement 5 étoiles de Luigi Di Maio - son allié gouvernemental, ont signé cet arrêté. Hier jeudi, l'Open Arms a porté secours à 55 immigrants, « dont 16 femmes et deux bébés » (précisent les journalistes, qui ne nous apportent pas autant de précisions lorsqu'ils s'agit d'hommes célibataires de vingt ou trente ans) retrouvés à la dérive sur une barque « qui prenait l'eau et menaçait de chavirer », à mi-chemin entre la Libye et l'île italienne de Lampedusa.
Hier soir les deux navires étaient encore dans les eaux internationales. L'Alan Kurdi se trouvait au large de Lampedusa mais à bonne distance de la ligne des 12 milles nautiques (22,2 km) marquant les eaux territoriales italiennes). Une autre source affirme que l'Alan Kurdi est depuis hier bloqué au large de l'île de Lampedusa avec ses 40 immigrés à bord.
Ce même jeudi, Matteo Salvini a annoncé avoir appris que le gouvernement allemand avait envoyé un message à la Commission européenne pour réclamer le débarquement des 40 immigrants du Alan Kurid à Lampedusa, sous peine que l'Allemagne ne prenne pas en charge 30 immigrants prévus dans un précédent accord... Donc, chantage, chantage aux immigrants.
« C'est un véritable chantage », a dénoncé Matteo Salvini. « Cela confirme que d'autres pays européens considèrent l'Italie comme leur camp de réfugiés. Mais les choses ont changé. Nous n'acceptons plus les ordres et les invasions ». La Tribune de Genève précisait hier soir vers 23 heures qu'il « n'a pas été possible d'obtenir pour le moment confirmation à Berlin de la démarche du gouvernement allemand ».
Aujourd'hui, l''ONG Proactiva annonce que l'Open Arms a secouru cette nuit 69 immigrants sur un canot trouvé au large de la Libye, 69 immigrants qui s'ajoutent aux 55 que le navire a récupéré hier. L'ONG espagnole affirme que le canot était « en difficulté » et que les personnes portent « de terribles signes de violence », dont deux enfants et « une femme enceinte de neuf mois avec des contractions ». Sur le pathos, certains penseront « chantage à l'émotion », l'ONG allemande Sea-Eye n'a pas fait moins bien : « trois jeunes enfants et une femme enceinte de six mois, ainsi qu'un homme blessé par balle et deux survivants du bombardement dévastateur début juillet du centre de détention de Tajura » sont sur l'Alan Kurdi.

Pour le navire des garde-côtes italiens, le Gregoretti, dans le port militaire d'Augusta (Sicile), lundi 29 juillet Matteo Salvini a autorisé quinze mineurs à débarquer (tous entre 15 et 17 ans) puis de nouveau une personne malade à la mi-journée. Six évacuations médicales avaient déjà eu lieu le 25 juillet et une femme enceinte de sept mois, ses deux jeunes enfants et son compagnon avaient obtenu l'autorisation de débarquer le 27 juillet. Mercredi 31 juillet, un autre immigrant souffrant a été débarquer à la mi-journée.
Ce même mercredi, la France, l'Allemagne, le Portugal, le Luxembourg et l'Irlande, et l'Eglise catholique italienne ont accepté de prendre en charge les 104 immigrants restants. La Commission n'a pas précisé leur répartition dans les pays mais selon les indications fournies par la Commission, plus de la moitié d'entre eux devraient être pris en charge par l'Eglise, donc rester en Italie. Le gouvernement français s'est engagé à recueillir « trente personnes, des réfugiés et non des migrants économiques », à précisé le ministère de l'Intérieur français. Ils seront accueillis en France dans les prochains jours. Lors des discussions pour la répartition, et avant de donner son accord pour une prise en charge, le ministre de l'Intérieur a « exigé que l'Italie elle-même accueille » certains de ces immigrants. « Une solution européenne a été trouvée pour les femmes et les hommes bloqués sur le navire Gregoretti. Ils vont débarquer en Italie, puis seront accueillis dans six pays, dont la France. Notre pays est fidèle à ses principes : responsabilité, solidarité et coopération européenne », a par la suite commenté le président de la République sur Twitter. « Le boulot est fait, mission accomplie », avait pour sa part tweeté Matteo Salvini.
Les 106 hommes restant à bord du Gregoretti ont débarqué mercredi après-midi dans le port militaire d'Augusta en Sicile et ont été conduits dans le centre d'accueil et d'identification (hotspot) de Pozzallo, un peu plus au sud. L'Eglise catholique italienne se prépare à recevoir 50 immigrants dans son centre de premier accueil de Rocca di Papa, au sud de Rome.
Donc 106 immigrants moins 50 pour l'Eglise catholique en Italie, moins 30 pour la France, il en reste 24 pour l'Allemagne, l'Irlande, le Luxembourg et le Portugal, soit 6 pour chacun. Et la France, 30.

Selon le ministère de l'Intérieur italien, plus de 3 700 immigrants sont arrivés d'Afrique depuis le premier janvier sur les côtes italiennes, dont 950 en juillet.
L'Ocean Viking, le nouveau navire de SOS Méditerranée (l'ONG de l'Aquarius) et Médecins sans frontières, est arrivé à Marseille lundi (29 juillet) pour une escale technique avant de partir patrouiller dans les eaux internationales au large de la Libye. « Cette escale va nous permettre de finaliser les derniers préparatifs [...] de compléter notre équipement de recherche et sauvetage, notamment l'installation de canots et de radeaux pneumatiques et d'une antenne satellite supplémentaire », a déclaré la porte-parole de SOS-Méditerranée Laura Garel. Le navire, pavillon norvégien, appareillera ces jours prochains. « Nous retournons en mer car les gens meurent, il y a une souffrance humaine à échelle industrielle », avait déclaré la semaine dernière la présidente de Médecins sans frontières Joanne Liu. Les Etats ont une « logique meurtrière » en voulant « faire disparaître les sauveteurs » et en proposant pour « solutions » [...] « la noyade ou le retour en Libye ». L'Aquarius a secouru 30 000 immigrants naufragés en trois ans (il a été condamné à cesser ses activités en décembre 2018).
Le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) vient d'annoncer que 669 personnes sont mortes en tentant de traverser la Méditerranée depuis le début de l'année (doivent y être ajouté les quelque 115 ou 150 immigrants morts dans le naufrage de leur bateau le 25 juillet au large de la ville de Khoms).


Photo : le 2 août 2017 la police italienne arrête et met sous séquestre le navire Iuventa de l'ONG allemande Jugend Rettet battant pavillon néerlandais (gouvernement Paolo Gentiloni, Parti Démocrate) : les enquêteurs soupçonnent l'équipage  d'avoir eu « des comportements favorisants l'immigration illégale » ; entre octobre 2013 et novembre 2014, l'opération militaire et humanitaire Mare Nostrum menée par la marine de guerre italienne a vu arriver en Italie 100 000 immigrants en provenance de l'Afrique-subsaharienne (majoritairement des Erythréens)

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